On parle moins des manifestations depuis deux jours. Tant mieux.
J'ai beaucoup lu au sujet de la colère des Brésiliens par rapport à leur Copa. J'ai discuté avec beaucoup d'entre eux, chez nous comme à Rio. Je respecte leur amertume et j'ai même la prétention de la comprendre.
Ceux à qui j'ai parlé récemment espèrent que le monde va cesser de s'y intéresser autant. Ici, on tend de plus en plus à laver son linge sale en famille, entre Brésiliens. Mais le monde, lui, cherche des manchettes. Par médias interposés, le monde continue d'opter pour la nouvelle chaude, la manifestation sanglante, le policier violent.
Au jour de l'ouverture, 200 millions de Brésiliens ont célébré leur Copa. Deux cents Brésiliens ont manifesté à Sao Paulo en mettant le feu à des pneus et en faisant du grabuge. 200 millions d'un côté et 200 de l'autre. Et devinez de qui on parlait d'abord dans les bulletins de nouvelles télé et sur les sites Internet du monde entier? Jusqu'à la victoire du Brésil sur la Croatie, jeudi, ce sont les manifestants qui passaient devant. Et pourtant : 200 millions contre 200.
Et cet autre papier sur la grève dans les deux aéroports de Rio qui, pouvait-on lire, allait paralyser les activités. Paralyser? Attendez un peu... Le syndicat s'est soumis à une injonction et pas plus de 20 % des employés avaient le droit de débrayer simultanément. Il en restait donc 80 %. C'était plus lent dans les aérogares. Seulement quatre bagagistes au lieu de cinq pour transporter vos valises de l'avion au carrousel douane... Plus lent. Mais où est le drame? Où est la paralysie?
Ça n'a plus rien à voir avec les manifestations spontanées de l'an dernier, quand l'augmentation des tarifs de transport en commun a fait déborder le vase. Tout le monde est alors descendu dans la rue. Ce qui n'est manifestement plus le cas.
La Copa d'Antonio
Antonio savait ce qu'il faisait quand il a quitté l'Argentine pour venir travailler au Brésil pendant la Coupe du monde. Il a mis de côté ses études en journalisme et il a pris la direction de Rio où on l'a embauché comme serveur au restaurant La Fabrique.
La rivalité sportive entre l'Argentine et le Brésil est immense. On se déteste et on aime se détester. Et au resto, comme partout dans Rio, Antonio est le souffre-douleur tout indiqué. Antonio préfère en rigoler. Il n'essaie plus de convaincre qui que ce soit que Maradonna est un plus grand joueur que Pelé. Quoique... il a tout de même essayé avec moi. Et il est très convaincant.
Stéphane, le propriétaire de La Fabrique, se félicite de l'avoir embauché. Antonio est sympathique, il parle trois langues et il travaille bien.
Français d'origine, Stéphane sait ce que c'est que de rivaliser avec le Brésil. Tout ira très bien et on le fera avec le sourire à deux conditions: la première, qu'il n'y ait pas d'affrontement direct entre les pays; et la seconde, que le Brésil ne soit pas éliminé.
Je repasserai les voir dans l'une ou l'autre de ces éventualités.
En attendant, l'Argentine joue son premier match dimanche à Rio.
Lune orange
Je suis un photographe redoutable, le genre à ne pas inclure la tour Eiffel dans une photo de la tour Eiffel. Après la victoire néerlandaise contre l'Espagne, la nuit est tombée, la lune est montée dans le ciel paré de belles teintes d'orange. Un poème! Je vous en parle plutôt que de vous le montrer parce que j'ai réussi à rater l'ajustement. À l'avant plan, la plage est hors foyer. À ma décharge, je travaille avec un appareil précambrien; un genre de téléphone à cadran qu'on aurait doté d'une pile et d'un « kodak ».
À la place, je vous mets une photo tirée du web et qui illustre la défense espagnole contre les Pays-Bas. Elle m'a bien fait rire.
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